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Une identité juridique pour tous : Pourquoi nous devons relier les systèmes ESEC aux systèmes de gestion de l’identité

Indentification cards
Mumbai, India. Photo: © Simone D. McCourtie/World Bank

La preuve de l’identité juridique est l’une des choses les plus importantes que l’on puisse posséder. Il déverrouille l’accès aux services de base et vous permet d’exercer vos droits. Il vous aide à ouvrir un compte bancaire, à demander des prestations, à voyager, à demander une protection juridique, et plus encore.

Pourtant, on estime que plus d’un milliard de personnes dans le monde n’ont aucun moyen de prouver leur identité. Cela les expose à un risque accru de pauvreté, d’apatridie, d’exploitation et de traitements abusifs. De plus, ce manque d’identification empêche les pays d’assurer la prestation efficace de services et de favoriser la croissance.

Garantir une identité juridique à tous est fondamental pour plusieurs des Objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies et c’est une cible ODD en soi. Nous devons redoubler d’efforts si nous voulons y parvenir d’ici 2030.

Qui sont ces un milliard de personnes dans le monde qui n’ont aucune preuve d’identité?

Plusieurs facteurs influent sur l’inscription d’une personne dans son registre national de l’identité :

Géographie

Plus de 90 % du milliard de personnes qui n’ont pas de preuve d’identité vivent dans des pays à faible revenu ou à revenu moyen inférieur. Certains de ces pays n’ont pas de système d’identification. Beaucoup ont un système d’identification qui couvre une proportion insuffisante de la population et utilise une approche décentralisée sur support papier qui se traduit par des dossiers incomplets et en double.

Âge

Près de la moitié des personnes sans preuve d’identité sont plus jeunes que l’âge à laquelle la délivrance d’une carte d’identité nationale est obligatoire, ce qui est de 16 à 18 ans dans la plupart des pays à revenu faible ou moyen inférieur. Idéalement, l’identité d’une personne devrait commencer à être consignée à la naissance. Mais l’enregistrement de l’identité commence beaucoup plus tard dans la plupart de ces pays. Cela nuit aux services aux enfants et augmente le risque d’exploitation, d’usurpation de l’identité et de fraude à l’identité.

Sexospécificité

L’écart mondial entre les genres en matière d’identification est inférieur à 2 %. Cependant, dans les pays à faible revenu, une femme sur deux n’a pas de preuve d’identité juridique, contre un homme sur trois. L’identification est essentielle à la réalisation de l’égalité entre les sexes et pour favoriser l’autonomisation des femmes et de leurs enfants.

Revenu

Les personnes pauvres sont souvent exclues de l’enregistrement de l’identité. Dans les pays à faible revenu, 45 % du cinquième segment le plus pauvre de la population n’a pas d’identité, contre 28 % du cinquième segment le plus riche.

Citoyenneté et ethnicité

Certains pays ont des systèmes d’identification discriminatoires à l’égard des non-ressortissants ou des personnes de certaines ethnies. Par exemple, la citoyenneté est fondée sur l’ethnie au Myanmar et il y a des obstacles importants à l’obtention d’une identité pour ceux qui n’entrent pas dans les 135 « races nationales ». 

L’établissement de systèmes d’identification inclusifs

Nous pouvons aider à fournir une identité pour tous en construisant des systèmes d’identification inclusifs qui sont reliés au système d’enregistrement et de statistiques de l’état civil d’un pays (ESEC).

Un système ESEC enregistre les événements démographiques – y compris les naissances, les décès, les mariages et les divorces – sur une base continue et permanente. Le système d’identification est le prolongement logique du système ESEC. L’établissement de liens entre ces systèmes présente d’importants avantages :

Universalité

Un système ESEC qui fonctionne bien couvre l’ensemble de la population d’un pays, y compris les non-ressortissants, tout au long de la vie de chaque individu. Ainsi, l’intégration des systèmes d’identification et des systèmes ESEC peut contribuer à garantir que les groupes vulnérables, tels que les femmes, les enfants et les personnes pauvres, aient accès à une preuve d’identité juridique. Sans cela, ils sont incapables d’accéder aux services conçus pour les protéger.

Sécurité

Un système ESEC efficace n’enregistrera l’identité d’une personne qu’à sa naissance; le système sera ensuite mis à jour pour tenir compte des pièces d’identité au fur à mesure que celles-ci changent au cours de sa vie. L’établissement de liens avec ces données peut donc réduire les doublons dans un registre d’identification. Puisqu’un système ESEC fournit également des données sur les décès, il peut être utilisé pour retirer des personnes du registre d’identification lorsqu’elles décèdent, ce qui contribue à les protéger contre le vol d’identité et la fraude.

L’inviolabilité juridique

Un système ESEC fournit des renseignements et des documents qui ont une inviolabilité juridique. Il s’agit d’une étape cruciale pour donner aux gens une identité juridique et sûre.

Utilisation efficace des ressources

La plupart des pays disposent d’un système ESEC bien établi, qui fournit les renseignements nécessaires pour construire ou renforcer un système d’identification. Un système ESEC est relativement peu coûteux à entretenir – la Banque mondiale estime le coût à 0,50 USD par habitant.

Étude de cas : Numéros d’identification uniques du Pérou

Le Pérou a relié avec succès ses systèmes d’identification et ESEC avec un numéro d’identification unique (NIU). Chaque personne reçoit un tel numéro à l’enregistrement de sa naissance, ce qui lui donne un accès immédiat aux soins de santé et autres services publics. Ce numéro est utilisé pour valider l’identité d’une personne tout au long de sa vie.

Selon la loi, les NIU sont les seuls numéros d’identification qui peuvent être utilisés sur les permis de conduire, les passeports, les identifiants de sécurité sociale et les registres fiscaux et militaires. Ceci montre comment le pays avance vers un système intégré de gestion des identités qui soit sûr, inclusif et efficace.

La prestation de services au Pérou s’est considérablement améliorée grâce au lien entre ses systèmes d’identification et des systèmes ESEC. Par exemple, les demandes de soutien nutritionnel pour les nouveau-nés sont maintenant traitées dans les 72 heures au lieu de deux mois. De plus, la proportion de personnes qui reçoivent du soutien dans un délai d’un mois est passée de 36 % à 71 %.

Le Registre national d’identification et de l’état civil (RENIEC) travaille actuellement à d’autres améliorations, notamment l’identification électronique, les certificats numériques et un « guichet unique » en ligne où les citoyens peuvent interagir avec les institutions publiques.

Défis et prochaines étapes

L’établissement d’un lien entre la gestion des identités nationales et les systèmes ESEC est une étape fondamentale pour assurer l’identité juridique pour tous. Cependant, de nombreux pays doivent d’abord renforcer leurs systèmes ESEC afin de s’assurer qu’ils sont universels, précis et fiables. Plus de 110 pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire ne disposent pas d’un système ESEC solide.

Les pays doivent également appuyer le processus d’établissement d’un lien entre des systèmes d’identification et des systèmes ESEC en mettant en place les ressources, les technologies et les cadres juridiques et institutionnels adéquats.

Le Centre d’excellence sur les systèmes ESEC a publié un nouvel article intitulé :Établissement d’un lien entre les systèmes d’identification nationaux et les systèmes ESEC : Un impératif du développement inclusif pour aider les gouvernements, les praticiens et les autres parties prenantes à construire des systèmes d’identification inclusifs. Ce document fait partie de notre série de synthèses de connaissances sur le genre et des systèmes ESEC, produite en partenariat avec Open Data Watch.

Prochainement, nous disposerons d’une ressource de connaissances beaucoup plus détaillée qui permettra d’échanger les leçons retenues dans les pays du monde entier. Le Recueil de bonnes pratiques pour relier les systèmes d’enregistrement et de statistiques de l’état civil (ESEC) et les systèmes de gestion de l’identité sera disponible à partir d’octobre 2019 à l’adresse systemesesec.ca/recueil-identite  

Enfin, nous organisons conjointement une réunion de haut niveau à la 74e Assemblée générale des Nations Unies pour susciter un engagement mondial en faveur du renforcement des systèmes ESEC et d’identification. L’événement – L’enregistrement des faits d’état civil, les statistiques de l’état civil et l’identité afin de ne laisser personne de côté – se tiendra le 26 septembre 2019 au siège des Nations Unies à New York, en partenariat avec la Division de la statistique des Nations Unies et le Partenariat mondial pour les données de développement durable (GPSDD).