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Les réfugiés sans documents de l’état civil ou documents d’identité sont plus vulnérables. Que pouvons-nous faire pour les aider ?

Children walking down a road
Photo: Natalia Cieslik / World Bank

Plus que jamais auparavant les gens sont contraints par les conflits et les catastrophes à laisser leur foyer derrière eux. Approximativement 68 millions de personnes à travers le monde ont été forcées de fuir leur foyer, soit une personne toutes les deux secondes. Plus d’un tiers de ces personnes, en quête de sûreté, sont allées jusqu’à traverser des frontières internationales.

Les réfugiés sont confrontés à des difficultés d’une ampleur difficile à imaginer. Ils entreprennent de longs et dangereux périples durant lesquels bon nombre d’entre eux seront victimes de souffrances physiques, d’exploitation et d’abus. Même s’ils parviennent à atteindre les frontières d’un pays d’accueil, ils peuvent vivre de longues périodes d’incertitude et de pauvreté.

Les documents de l’état civil et d’identité contribuent pour beaucoup à abattre les obstacles et à atténuer les risques auxquels les réfugiés sont exposés. L’enregistrement des naissances confirme le nom et le lieu de naissance d’un enfant ainsi que l’identité de ses parents. Il est dès lors possible pour un enfant de prouver sa nationalité et d’exercer ses droits. La personne en mesure de prouver son âge, son identité et sa nationalité jouira d’une plus grande liberté de mouvement, d’un accès aux services essentiels et d’un filet de protection sociale. Les documents d’identité représentaient le besoin le plus urgent pour plus de la moitié des réfugiés interrogés au Niger et au Togo, qui les jugeaient plus urgents que la nourriture, les soins de santé, le transport et le logement.

Malheureusement, il arrive trop souvent que les réfugiés se retrouvent sans documents de l’état civil et documents d’identité.

Pourquoi les réfugiés n’ont-ils pas en leur possession une preuve de leur identité ?

Plusieurs raisons peuvent expliquer l’absence de documents attestant l’enregistrement à l’état civil ou l’identité. Il se peut, par exemple, que les documents aient été :

  • perdus pendant un voyage difficile, comme la traversée d’une mer houleuse dans un bateau surpeuplé,
  • volés, les réfugiés étant plus exposés aux actes criminels,
  • détruits par les conflits ou les catastrophes,
  • confisqués pendant des conflits ou des déplacements,
  • transportés par un parent dont ils ont été séparés.

Puisqu’il est rare que les réfugiés aient accès à des services d’enregistrement pendant leur migration, ils sont dans l’incapacité de remplacer les documents perdus ou de faire enregistrer de nouvelles naissances.

L’absence de tout document d’identité peut même devenir une cause de déplacement forcé plutôt qu’en être une conséquence. Les populations marginalisées ont souvent du mal à avoir accès à des services d’enregistrement des faits d’état civil, ce qui les laisse sans aucun moyen de prouver leur nationalité. En Afrique subsaharienne, plus de 750 000 personnes se sont vu refuser une nationalité, principalement parce que leur naissance n’avait jamais été enregistrée.

Que se passe-t-il lorsque les réfugiés n’ont pas de documents de l’état civil ni de documents d’identité ?

Ils perdent leur liberté de mouvement. Sans preuve d’identité, les migrants ne peuvent franchir une frontière internationale à un poste de contrôle et doivent se tourner vers d’autres moyens, plus dangereux, pour le faire, comme les contrebandiers.

Ils peuvent se voir refuser l’asile. Les migrants peuvent demander le statut de réfugié dans le pays d’accueil, ce qui leur confère protection et droits. Or, le processus sera plus long sans une preuve d’identité, et leur nationalité pourrait devoir être établie par d’autres moyens moins fiables, ce qui mène souvent à un rejet injuste de leur demande, cela sans compter la déportation ou l’apatridie de véritables réfugiés.

Des familles sont séparées. Il est difficile pour les réfugiés sans documents de l’état civil de prouver les liens de parenté. Ils courent le risque d’être séparés ou peuvent avoir du mal à retrouver les membres de leur famille dont ils ont perdu la trace.

Un avenir incertain attend les enfants. Les mères qui donnent naissance pendant une migration ou après leur arrivée dans un pays d’accueil sont parfois incapables d’enregistrer leur enfant ou de prouver leurs liens de parenté et leur nationalité.

Ils deviennent plus vulnérables. Les réfugiés sans documents d’identité n’ont en général accès qu’aux services de base les plus élémentaires, comme certains services d’urgence. Ils sont souvent incapables de trouver du travail, d’exercer leurs droits et d’avoir accès à des mesures de protection sociale. Déjà vulnérables, ces personnes sont plus à risque de connaître la pauvreté, l’exploitation et les abus.

Il est plus difficile de retourner dans leur pays d’origine. Sans preuve d’identité et de nationalité, il est parfois impossible pour les réfugiés de retourner dans leur pays d’origine ou de récupérer leurs biens et leurs droits.

Enregistrement fonctionnel

Les États membres des Nations Unies et le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCNUR) ont pour obligation de remettre aux réfugiés un document, quel qu’il soit, pour prouver leur identité. Le HCNUR apporte son concours pour planifier ou effectuer l’enregistrement, que ce soit de concert avec le gouvernement ou en son nom, ou peut procéder à l’enregistrement de son propre chef, tel que le prévoit son mandat. Pour ce faire, on a généralement recours à l’enregistrement dit « fonctionnel «, qui désigne le processus par lequel les renseignements sur les personnes déplacées d’urgence sont recensés, mis à jour et vérifiés. Le HCNUR peut également remettre des certificats aux réfugiés d’États non membres, mais ces documents n’ont souvent aucune valeur juridique.

L’enregistrement fonctionnel est essentiel pour fournir aux réfugiés une aide humanitaire, protéger leurs droits et aider les gouvernements à gérer une migration rapide. Les problèmes surviennent lorsque les activités d’enregistrement fonctionnel ne sont pas coordonnées avec les systèmes d’état civil. Une fois la crise passée, il peut être plus difficile pour les pays de se reconstruire ou de gérer les populations de réfugiés avec efficacité à long terme.

Vers un processus d’enregistrement conjoint et coordonné

Le monde est aujourd’hui le théâtre de déplacements sans précédent. C’est pourquoi il est plus important que jamais de mettre en place des systèmes efficaces et coordonnés d’enregistrement des réfugiés afin qu’ils puissent être protégés et recevoir tous les services dont ils ont besoin.

En novembre 2018, le Centre d’excellence sur les systèmes d’enregistrement et de statistiques de l’état civil (ESEC) a coanimé, en collaboration avec UNICEF et le HCNUR, un atelier sur l’enregistrement des faits d’état civil et la gestion de l’identité dans les contextes humanitaires. L’événement a réuni des experts techniques et des gouvernements pour qu’ils se penchent sur l’élaboration de lignes directrices en matière d’enregistrement des faits d’état civil et de gestion de l’identité dans les situations d’urgence.

Cet effort concerté a permis de faire ressortir plusieurs priorités, dont les suivantes :

  • injecter des fonds dans l’expansion du personnel affecté à l’enregistrement des faits d’état civil et à la gestion de l’identité,
  • améliorer les systèmes de TI grâce à de l’équipement supplémentaire et perfectionné,
  • améliorer les échanges de données entre les systèmes d’état civil et d’enregistrement fonctionnel,
  • mettre au point des plans d’urgence coordonnés aux interventions d’urgence des gouvernements,
  • opter pour des systèmes d’enregistrement coordonnés contenant des données à la fois sur les populations des pays d’accueil et celles de réfugiés,
  • Améliorer la coordination et le partage du savoir entre les partenaires.

Nous avons également fixé les objectifs suivants :

  • organiser des consultations nationales dans les pays prioritaires en vue de recueillir des renseignements approfondis sur la situation de l’état civil et la gestion de l’identité dans un contexte d’urgence;
  • élaborer et distribuer des lignes directrices et des recommandations concernant l’état civil et la gestion de l’identité dans les contextes humanitaires;
  • procéder à une étude mondiale sur le partage renseignements entre des systèmes d’enregistrement fonctionnels et fondamentaux.

Pour obtenir de plus amples renseignements sur les faits saillants de l’atelier, restez à l’écoute pour le rapport officiel.